Saxa House ⊹ N°8, 4ième étage.

J’étais toujours fasciné lorsque j’entrais dans les résidences des lutteurs. Tout était si riche, si neutre. Rien ne traînait dans les couloirs, les murs étaient blancs, les meubles dans les teintes foncées. Ça puait le snobisme. J’aimais bien ces gens quand même. Surtout ceux qui ne se prenaient pas la grosse tête avec cette belle petite vie menée. Et puis s’ils avaient la grosse tête et qu’ils se trouvaient beaux et parfaits, alors je prenais un malin plaisir à les faire péter des plombs. Vous voyez un peu où je veux en venir ? À l’appartement de Saxa, exactement. Je montai jusqu’au quatrième étage en prenant l’escalier, question de bien commencer la journée. De toute façon, mon chien ne se tenait pas tranquille dans un ascenseur. Nous étions dimanche, il était sept heures trente le matin. Je venais de boire mon café, mais malencontreusement on avait oublié de me laisser mon journal dans ma boîte aux lettres personnelle. Au lieu de le piquer au voisin, je traversai de la résidence des lutteurs pour aller cogner à la porte de Saxa. Après plusieurs martèlements sur sa porte, elle vint enfin me répondre, frustrée. Elle n’était pas maquillée, ni coiffée. « Oh, je t’ai réveillée ? Je suis désolé, je ne pensais pas te prendre dans un aussi mauvais moment. » J’entrai tout de même dans son logement. « Tu permets ? » Dis-je en la tassant légèrement sur mon passage. Mon chien, connaissant plutôt bien l’endroit, entra en trombe et alla s’asseoir en-dessous de la table, comme un grand. Je refermai la porte derrière moi et lui offrit un énorme sourire. « Dis, tu reçois le journal ici ? C’est que le mien, ils l’ont oublié j’crois. Du coup j’ai pas pu aller le lire tout en faisant mes premiers besoins de la journée, alors je me suis dit que j’viendrais faire tout ça ici. » Je n’avais pas peur du ridicule, et tout le monde savait que j’étais un peu dégueu et sans gêne, alors je ne me cachais plus. Je la regardais bêtement avec un petit sourire niais au visage, attendant patiemment que le volcan m'explose en pleine figure.

toc, toc, toc. Et voilà le mal de tête me prend, et je viens tout juste de me réveillez. Mais qui est assez débile pour venir cogner à cette heure chez les gens ? Je tentai d'ignorer ce bruit sourd qui m'avait sortie de mon rêve. toc, toc, toc. Pourquoi ce stupide son persistait ? Et surtout, pourquoi c'était moi qui avait été réveillé par le bruit et pas quelqu'un d'autre. Et pourquoi j'avais l'intuition que le bruit de la porte ne cesserait pas tant que quelqu'un serait pas allé ouvrir. Et puis merde. Je pris mon courage à deux mains, enfilai ma robe de chambre et sortis de ma chambre en direction de la porte d'entrée. J'ouvris la porte, totalement exaspérée avant d'apercevoir Gannicus. Entre son prénom, totalement immature et sa personne, je me demandais vraiment ce qui faisait plus mature. Sûrement son prénom. Je soupirai un bon coup, tandis qu'il m'expliquait qu'il ne savait pas qu'il allait me réveillé. Pffff, c'est sur. En plus de vouloir me réveiller bien trop tôt, il se moquait de moi. C'était vraiment ma journée. Alors qu'il entrait dans mon appartement je lançai sèchement : « fait comme chez toi. » Bien sur que je voulais qu'il parte, et pas dans quatre ans. MAIS BIEN SUR, c'était trop demander. Alors que son chien fonçait pour aller se coucher sous ma table, il me demanda si je recevais le journal. Oui je recevais le journal, non il ne le lirait pas. « Non, je ne reçois malheureusement pas le journal, c'est un truc pour les vieux. Mais si tu veux, j'ai des revues de mariage, je peux peut-être aller en chercher une ? », dis-je avec un petit sourire en coin. Mais je n'avais pas terminé. « D'ailleurs, vous allez bientôt vous marier ? » Je repris ma respiration avant de continuez : « Je parle de toi et ton chien, hein. Non, mais vous êtes toujours ensemble. Je commence sérieusement à me poser des questions... » Je me dirigeai donc vers la cuisine, pour commencer à me préparer un petit dej'. Je pris un élastique et attachait rapidement mes cheveux en chignon.

Je souris quand je l’entendis me dire de faire comme chez moi, d’un ton de voix sarcastique et exaspéré. Je faisais toujours comme chez moi, ici. De toute façon, Saxa devait bien avoir assez d’argent pour se payer un agent de sécurité personnel si elle le désirait, alors pour ne pas en poster un devant sa porte afin qu’il m’empêche de pénétrer son logement ? Si je la répugnais à ce point, je ne voyais pas où l’exagération était. Aux grands mots les grands moyens, après tout. Je regardai un peu autour de moi tout en lui demandant si elle avait le journal. Sans même que je puisse répliquer à sa proposition de me donner des revues de mariage, elle enchaîna en sous-entendant que mon chien et moi aurions bien besoin de cet union. « Non, c’est simplement mon fidèle animal de compagnie, je te rassure. De toute façon, je ne crois pas que la zoophilie soit légal au État-Unis. » Affirmais-je tout simplement, d’un ton sérieux et se voulant persuasif. Je me rendis finalement jusqu’au comptoir de sa cuisine, où était empilé une tonne de paperasses. Je pris le tour dans mes mains et commençai à faire le tri. « Des magazines, des factures, des relevés de transaction, oh ! Tiens ! Le journal d’hier. » Je tendis glorieusement le journal dans les airs. « Mais que fait-il dans ce fouillis puisque tu ne reçois pas le journal chez toi ? C’est bizarre. » Je m’approchai de Saxa et, à quelques centimètres de son visage, je murmurai : « On dirait qu’il y a une menteuse ici … » Je me décollai d’elle puis commençai à regarder dans chaque pièce de l’appartement. « Tes toilettes, elles sont .. ? » Et j’attendis ses indications, sachant fort bien qu’elles me mèneraient hors de son logement. Comme j’aimais ces petites altercations entre elle et moi. Sans jamais devenir violentes ou colériques, nous gardions un minimum de respect pour l’autre (moi un peu moins qu’elle), passant notre message principal sous des phrases sarcastiques ou ironiques. J’aimais son intelligence et ses répliques bien pensées. Nous y allions toujours du tac-o-tac.

Je regardai du coin de l’œil la jeune femme sortir le bacon et les œufs du frigo, souriant en coin, me gardant encore quelques idées en tête pour la suite des choses. Toutefois, pour le moment, je me concentrais sur mes emmerdes actuelles. Il ne fallait pas trop en mettre non plus ; chaque blague en son temps. « Toi ? Heureuse pour moi ? Eh bien ! Qui l’aurait cru ! » C’est vrai, quoi. Saxa était loin de m’apparaître comme une femme qui se soucierait de mon bonheur. Et pourtant, pour ma part, si elle en venait à être malheureuse, je changerais certainement d’attitude envers elle. J’aimais me moquer des autres, mais je n’étais pas cruel. Si elle était déjà au fond du baril, je n’allais pas en creuser le fond pour qu’elle tombe encore plus bas. Pour le moment toutefois, Saxa était dans une assez bonne situation alors je me délectais de toutes les blagues que je pouvais lui faire. Je tombai finalement enfin sur le vieux journal d’hier et je ne me fis pas prier pour lui remettre son mensonge sous le nez. Ses explications me firent lever les yeux au ciel. « Ils sont chanceux, eux. » Lançais-je en référence au fait qu’elle ne leur disait pas quoi faire et quoi ne pas faire. Je rigolai légèrement à ma réplique avant de me concentrer sur l’emplacement de la salle de bains. « Oui, j’en ai chez moi. Enfin, une quoi. Trois, c’est un peu de l’abus tu trouves pas ? Puis c’est tellement plus plaisant d’aller squatter celles des autres ! » Je flattai mon chien qui s’était assis à côté de moi entre-temps. « Je suis comme Todd, je marque mon territoire en laissant mon odeur partout où je vais ! » Je lui fis un clin d’œil avant de finalement trouver une pièce où se trouvaient les toilettes. J’y entrai sans plus tarder et refermai la porte. Évidemment, je n’avais aucunement envie d’y aller ; c’était simplement pour la faire devenir rouge de colère. Je ressortis après cinq minutes à l’entendre gronder de l’autre côté de la porte. « Aaaah … ça fait du bien ! Bon, ce bacon et ces œufs, ils doivent être prêts là non ? Je suis A-FFA-MÉ. » Proclamais-je haut et fort.

Son commentaire sur le fait qu'il était comme son chien, avait totalement horripilé. En temps normal, j'utilise un langage plus familier, mais là, c'est vraiment dégueulasse. Comme si je voulais savoir ça. ET BAH NOOOON ! J'aurais passer mon tour, volontiers même ! J'en ai encore des frissons, juste à y penser. Mais au moins, la bonne nouvelle c'est qu'il a utiliser la salle de bain d'en bas, celle que j'utilise le moins souvent (soyons claire, ma chambre est en haut, je ne descendrai pas tout le temps) Je tentai de me changer les idées, malgré les visions d'horreur que j'avais en tête, en terminant de préparer mon petit dej'. Je tournai mon bacon, pour qu'il soit cuit des deux côtés, et me fit cuire un œuf tourné crevé, comme je les aimais et que je les mangeais donc tout le temps. Je les mis donc dans une assiette avant de me diriger vers le grille pain pour y prendre ma toast. Je sortis le beurre, en disant la mille-unième injure de la journée et commençai à tartiner mon pain. C'est alors qu'il ressorti de la salle de bain, alors qu'il éclaira se sentir mieux et avoir maintenant faim. NOOOON, MAIS JE VEUX PAS LE SAVOIR. J'avais presque réussi à enlever mes affreuses visions et voilà qu'elles recommençaient. MERCIII. UN GRAND MERCI. « Si t'a faim, t'a qu'à te servir, y'a des céréales dans cette armoire là, tout ce qu'il faut pour faire des crêpes dans celle-là. Ah et puis il me reste un peu de pain sur le comptoir. La confiture est dans le frigo, t'a qu'à te servir. AH ET PAS TOUCHE, À MES ŒUF ET MON BACON. » Je pris donc mon assiette à deux mains, me dirigeai vers la table, où j'y avais déposé un verre de jus d'orange. Et regardant le chien étendu sur le sol, je décidai de lui lancer l'une de mes tranches de bacons. Après tout, lui il le mérite ce bacon. C'est pas un chieur de première, c'est juste le larbin qui le suit partout, parce qu'il n'a pas le choix. Le pauvre, ça doit pas être facile tous les jours... En tout cas, moi je serais sûrement en grosse dépression de passer autant de temps avec Gannicus.

J'aimais tellement voir les réactions de Saxa. Elle ne répliquait pas tout le temps, mais ses expressions faciales valaient mille mots et me laissaient devenir exactement ce à quoi elle pensait à ce moment précis. Alors quand je parlai de ma ressemblance avec mon chien en matière de marquer mon territoire, j'éclatai de rire. Quand je revins de la salle de bain dans laquelle je n'avais réellement que perdu mon temps, la demoiselle me proposa de me servir si j'avais faim. J'haussai les sourcils, visiblement surpris de l'offre, même si elle ajouta que je n'avais point le droit de toucher à ses œufs et bacon. « T'es vraiment en train de me proposer à manger plutôt que de me foutre dehors ? Attends là, arrête parce que sinon je vais croire que tu commences à t'intéresser à moi. » Je lui fis un petit clin d'oeil avant de me diriger vers une armoire et en sortir les ingrédients nécessaires pour faire des crêpes. Sans gêne, je sortis des bols dans lesquels je mélangeai la farine, les oeufs, le sucre, le lait et la vanille. Je brassai mon mélange tout en me tournant vers Saxa, adossé contre son comptoir, une jambe croisée devant l'autre. « Je te fais des crêpes à toi aussi ? Sans déconner elles sont bonnes mes crêpes, c'est toujours moi qui cuisine chez moi. » Je vis alors que Saxa venait de jeter un bout de bacon à mon chien. J'écarquillai les yeux. « Hé ! C'est pas bon pour lui ça, c'est tout gras ! » Non mais elle n'était pas gênée à nourrir mon chien avec de la merde. Mon chien c'était un sportif en santé, comme moi. Il ne fallait pas qu'il ingère ces cochonneries engraissantes. J'oubliai quand même cet épisode et me tournai de nouveau vers les ronds de poêle afin de verser une certaine quantité de mon mélange dans l'une des poêles. « Alors, est-ce que tu t'entraînes pour le premier show d'Animosity ? » Je demandais cela comme ça, sans arrière-pensée, juste pour faire la discussion. Dès que le sujet était en lien avec le catch, j'étais tout ce qu'il y avait de plus sérieux. Et croyez-le ou non, je ne vivais pas que pour emmerder Saxa, alors m'intéresser un peu à ses activités ne me demandait pas de me forcer.

Je cessai un moment de la taquiner ou de me moquer d’elle afin de réellement prendre de ses nouvelles. Saxa venait d'être embauché dans une federation et comme je m’intéressais énormément à ce sport, étant lutteur moi aussi, je la questionnai sur ses entraînement, qu’elle n’avait pas encore vraiment commencé semblait-elle dire. « Faut pas que tu traînes trop, ça approche bientôt quand même ! T’as pas un entraîneur privé ? Si oui, il fait mal son boulot de motivation. » Dis-je en rigolant, buvant une gorgée du jus d’orange que je venais de me servir. Cette relation que j’entretenais avec Saxa était des plus étranges. Je débarquais chez elle sans prévenir, on s’envoyait des vannes, elle me proposait à déjeuner, et je restais volontiers, me servant par moi-même dans ses armoires. C’était à n’y rien comprendre. « Dans quoi tu étudies, déjà ? » S’il y avait bien un endroit que je n’avais jamais ramené ma fraise pour l’emmerder, c’était bien à son école. Tout simplement parce que j’ignorais où c’était, quel nom cela portait, etc. J’aurais pu pousser mes recherches en demandant tout simplement à son frère, qui était mon meilleur ami par la même occasion, mais faut croire que j’avais quand même mieux à faire que ça. De temps en temps. Deux de mes crêpes étaient prêtes alors je m’empressai de mettre du Nutella et des tranches de bananes à l’intérieur, avant de les rouler. J’en déposai une dans une assiette, l’autre dans une autre. C’est à ce moment que Saxa m’envoya une vanne alors que je croyais avoir signé un traité de paix pour la matinée. « Ha-ha-ha. Non, je suis pas trop vieux, mais je te rappelle que j’ai signé un contrat pour être présent à chaque show. J’peux pas me désister. » Je passais mes journées a m'entrainer. Souvent sur la plage dans mes temps libres et plus le temps avançait, plus je pense que je pourrais me faire un nom dans le catch. Je pris les deux assiettes et en déposai une devant Saxa. « Digne d’un restaurant à déjeuner. » Une belle grosse crêpe roulée choco-bananes. On se serait cru chez Cora.

Je voyais bien que Saxa s’endormait debout, son menton sur sa main, les yeux mi-clos. J’y avais peut-être été un peu fort en la réveillant aussi tôt le matin. Personnellement, j’étais assez matinal malgré mon penchant pour les soirées qui se terminent tard. J’étais donc habitué à peu dormir, contrairement à elle, visiblement. Je me disais toutefois que tant qu’à l’avoir réveillée, aussi bien que ça en ait valu la peine. Elle ne se rendormirait sûrement même pas avec toute cette lumière dans son logement, de toute façon. J’hochai la tête quand elle me parla du fait qu’elle n’avait pas besoin d’un entraîneur. « Bah tu sais justement ça pourrait te motiver à y mettre plus d’effort. Sérieux, si tu reconsidères la chose, sache que je serais partant pour être ton entraîneur. Pro bono. » Saxa n’allait jamais accepter, mais l’offre était lancée. Cela faisait un bon moment que je cherchais à aider des lutteuses. C’était bien beau leurs données quelque conseille avant leurs matchs, mais j’aurais aimé un défi plus grand. Malheureusement, Saxa était la seule lutteuse que je connaissais assez bien pour le proposer. C’était dommage de savoir déjà en partant qu’elle allait refuser – mais en même temps, je l’avais cherché. La jeune femme me révéla finalement son lieu de travail. Bar comme stripteaseuse ? Elle s’attendait probablement à me troubler et à me déboussoler, mais j’haussai un seul sourcil avec un petit sourire intéressé. « Ah oui …? » Mais elle brisa mes rêves en m’affirmant qu’elle travaillait au Sea Temple. « Dommage, je serais passé te voir de temps en temps. » Tandis que pour le Sea Temple, ce ne serait pas à chaque jour. C’était plutôt dispendieux. Alors que je venais de m’asseoir en face d’elle, nos crêpes devant nous, le sujet des shows revint sur la discussion. « Ouais, mais bon, moi je vais devenir champion, genre la coqueluche de la fédération … » Les yeux de Saxa baissèrent jusqu’à son assiette et elle mentionna le fait qu’elles étaient très sucrées. Je souris. « Arrête de faire ta diva. Tu t’es vue ? Toute mince ! Et en plus tu t’entraînes ! T’as bien le droit à un petit réconfort signé Gannicus non ? » Je plantai ma fourchette dans ma crêpe, m’en arrachai un bout que je portai à ma bouche, lâchant un soupir de satisfaction.

Je croisai mes jambes sur ma chaise, pour me sentir plus à l'aise à cette place que j'occupais tous les matins. J'avais pris cette habitude il y a de cela quelques jours et maintenant elle me collait à la peau. Son offre m'avait cependant surprise, réellement. Avec un sourire au lèvre je répondis : « Avoue que tu t'amuserais bien à me donner des ordres. » Non, mais parce que c'était presque cela si on y pense bien deux minutes. Puis ça lui donnerait aussi d'autres raisons pour venir m'embêter les matins. « Je considère tout de même l'offre si jamais un jour j'ai besoin. » Je pourrais débarquer à trois heure du mat' en le réveillant pour qu'il m'aide. Ouais, comme ça on serait quitte. J'allais vraiment considéré cette option qui était très intéressante. Peut-être allait-il être surpris de mon presque oui, mais c'est qu'il ne savait pas ce qui l'attendait, croyez-moi. Comme je peux être très douée sur un ring, comme je peux être totalement nulle si je le souhaite. En parlant de mon lieu de travail, j'avais remarqué son expression avant d'avoir que je n'étais pas vraiment stripteaseuse. « Mais tu sais, si tu venais le soir au lieu de matin, tairait peut-être la chance de voir un prestation, non mais c'est que j'en fais souvent à mes colocs. » Ou comment dire un bêtise. Non mais peut-être qu'après ça, il laisserait tomber les venues aux petits heures du matin et viendrait un peu plus tard. Bon après s'il venait le matin aussi, je finirais par mourir, très sérieusement. « C'est sur que la lutte c'est bien mieux que le travail dans le resto. » Pour moi le catch, c'étaient toute ma vie et encore. Je passais une bonne partie de mes journées à observer des vidéos et je ne m'en laissais jamais. « Alors le moment de vérité. » Je coupai alors un morceau de la crêpe et le mît dans ma bouche. C'était bon, bien que trop sucrée pour moi. « Mouais, c'est pas si pire »

Saxa était la féminité incarnée, et moi la masculinité, selon les stéréotypes sociaux. Elle avait les jambes croisées, surveillait sa ligne, s’exprimait bien et était toujours bien soignée. J’avais les jambes toutes écartées, je m’empiffrais dans mes crêpes, j’étais vulgaire de temps en temps et j’avais les cheveux tout ébouriffés. Nous étions plutôt drôles à regarder, et probablement très intéressants à analyser. Sans penser toutefois à ces détails futiles, je proposai à la demoiselle de m’engager comme entraîneur. Enfin, engager n’était pas le meilleur terme à utiliser puisque je le ferais gratuitement. À ma plus grande surprise, elle ne refusa pas catégoriquement. Venais-je de me faire prendre à mon propre jeu ? Venais-je de mettre le pied dans mon propre piège ? « Oui, je m’amuserais bien à te donner des ordres, ça c’est clair. Et te voir en petit habit de lutteuse. » À moins qu’elle ne s’entraîne dans les « wet-suits » de lutteuse comme on les appelle. Dans les deux cas, j’allais pouvoir admirer sa belle silhouette. Bah quoi ? Saxa était franchement exquise pour les yeux, on n’allait pas se le cacher. La jeune femme m’affirma donc qu’elle considérerait l’offre si un jour elle avait besoin. J’hochai la tête avec un mince sourire. « Excellent. Tu me tiendras au courant. Tu sais où me trouver de toute façon. » J’étais souvent a la salle d'entrainement de la federation, alors elle n’avait pas le choix de me recroiser tôt ou tard. Elle devait vraiment détester le fait que je sois dans la meme federation qu'elle. J’étais probablement la personne qu’elle préférait le moins voir, et elle était obligée d’endurer ma présence. Suite à mes questionnements sur son job, Saxa me confia que je devrais passer plus souvent le soir au lieu du matin, pour avoir plus de chance de la voir en prestation de strip-teaseuse. J’haussai les sourcils. « Tu sais que je prends tout au sérieux, hein ? Ne te surprends pas si j’suis ici à chaque soir à partir de maintenant. » Je rigolai. Elle allait regretter sa petite blague. Je n’allais plus la lâcher avec ça. Bref, après avoir discuté de catch d’une façon banale et sans moquerie, Saxa goûta enfin à mon œuvre. Je fermai les yeux en secouant la tête, exaspéré par sa remarque. « Pas si pire ? T’es vraiment difficile. J’suis heureux de pas être ton copain, tu dois être difficile à combler. » Lâchais-je. Un peu cru, mais ce n’était pas voulu méchant. Je me demandai alors pourquoi Saxa était célibataire. Bon, je savais qu’elle était chiante sur les bords, mais je me disais que c’était seulement avec moi, parce que je le cherchais. Alors qu’est-ce qui clochait chez elle ?